vente Céramiques

« Café : Noir comme le diable Chaud comme l'enfer Pur comme un ange Doux comme l'amour. » Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord La collection de tasses litron présentée lors de cette vacation et réunie par un amateur au fil des ans nous présente un aperçu de ce bel objet et des décors variés qui on pu l’orner. La tasse litron apparaît à la manufacture de Vincennes vers 1752. Elle est très probablement l’œuvre de l’orfèvre Jean-Claude Duplessis qui, en plein règne du rocaille dont il était l’un des maîtres, invente avec génie cette forme pure et simple qui sera universellement et longtemps adoptée. Au fur et à mesure que la consommation de chocolat, thé et café commence à se répandre due aux différents échanges avec le nouveau monde et le commerce avec les Indes. Appelée aussi tasse carrée du fait que sa hauteur est égale à son diamètre, elle tire son nom du latin « litra » qui exprime une unité de mesure. Comme nous pouvons l’observer dans les différentes tasses présentées cette mesure n’est pas figée, il existe à la manufacture de Sèvres au XVIIIème siècle cinq grandeurs de 7,5 cm à 3,5 cm de haut. La tasse litron est généralement destinée à contenir du thé, mais elle peut être également utilisée pour le café ou le chocolat. Un important déjeuner en porcelaine de Sèvres est livré à la couronne royale en 1773, il se composait de six gobelets litron de la deuxième grandeur décorés de fruits et feuilles de thé et café, deux gobelets litron de la première grandeur décorés de fruits et feuilles de cacao, une théière et une cafetière (Archives MNS, Vy, 29 septembre 1773, f° 133r.). Ainsi, la tasse litron peut faire partie d’un déjeuner ou d’un cabaret mais aussi se suffire à elle-même. Citons ce gobelet litron décoré d’une vue de Bellevue sur fond bleu céleste acheté en 1783 par Madame Adélaïde pour la somme considérable de 504 livres. Dans cette collection, six gobelets litron en porcelaine tendre de la manufacture royale de Sèvres illustrent la variété des décors sur porcelaine sous le règne de Louis XVI : des guirlandes suspendues au semis de roses et barbeaux, des ornements néoclassiques chers au comte d’Angivillers au ruban plié annonçant le siècle suivant. La découverte du kaolin en France en 1768 est rapidement suivie par la création d’un nombre important de manufactures privées qui pour lutter contre le privilège de la manufacture royale se sont parfois placées sous la protection des membres de la famille royale. Ces « protections » n’ont toutefois pas empêché les nombreuses perquisitions du lieutenant général de police Sartine, mais elles offraient à l’évidence de nouveaux débouchés commerciaux pour ces manufactures particulières. Dans la collection sont présentes plusieurs tasses de la manufacture de Monsieur, comte de Provence à Clignancourt sous la direction de Moitte sous le n° 177, de la Manufacture du comte d’Artois sous le n° 180, de la Manufacture de la Reine, rue Thiroux sous les n° 181 et 184 et ou de la Manufacture de Monseigneur le duc d’Angoulème. Les troubles de la révolution française font souffrir, souvent jusqu’à la faillite, un bon nombre de ces manufactures privées. Les survivantes sont celles qui ont su se défaire de l’influence de la manufacture de Sèvres, créer leur propre style, innover techniquement et faire appel à de bons artistes. Citons la manufacture de Dagoty qui maîtrise avec succès les contrastes de mat et de brillance, elle obtiendra la protection de l’Impératrice puis de la duchesse d’Angoulème après la chute de l’Empire. A ce titre notons les deux tasses sous le numéro 202 et 203 dont nous pouvons rapprocher les décors en or d’une tasse litron conservée au Musée de Malmaison . Citons également la manufacture de Dihl et Guerhard (n°208). Protégée au XVIIIème siècle par le jeune duc d’Angoulême, elle prit son essor sous le premier Empire et reçue de nombreuses commandes notamment le célèbre service de l’Impératrice Joséphine ou de celui de son fils Eugène. Ou encore la manufacture de Nast (n° 176 – 196 – 204). Concernant la porcelaine européenne, il faut s’attarder sur le lot 188 de l’éphémère mais non moins brillante manufacture de Montplaisir à Schaerbeck. Le château et le Domaine de Montplaisir construit au XVIIème siècle passa entre différentes mains notamment le Prince Charles de Lorraine. Il fut vendu en 1784 à Jean Sébastien Veaume qui fonda en 1786 la Manufacture Royale et Impériale de Montplaisir où furent fabriquées de très belles porcelaines dans le style parisien de la fin du siècle comme nous pouvons le voir sur la tasse présentée. Le succès tardant et pour promouvoir sa manufacture il organisa une vente aux enchères de sa production en 1789 à Bruxelles. La manufacture fermera en 1790. La tasse présentée rappelle l’influence notable de Lagrenée et Salembier dans les décors sur porcelaine puisant eux leur source d’inspiration dans les gravures des Loges du Vatican de Raphaël.